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Je deviens.

C’est bien-sûr leur propre tricot d'existence, l'imposture par laquelle chacun s'est lui-même ici réénoncé pour croire survivre et ne pas devenir fou, qui, dans le mental est à la manœuvre, remplaçant en permanence tout ressenti par la pensée qui l'arrange.

Mais peu à peu, la vie s'expanse et prend sa place, tourne des pages. Des plis se défont, tandis que les rides se creusent.

Je deviens.

Il y avait une emprise, un voile, une enveloppe... je ne sais pas comment dire.

Je ne l'avais pas devinée, pas sentie.

Elle semble avoir toujours été là... Enfin non, sans doute pas. J'ignore depuis quand. Je n'ai aucune idée d'avant...

Je n'en avais tout simplement pas conscience.

J'invisibilisais sa forme en la confondant avec le fond qu'elle déformait. D'évidence, elle n'en est pas, et à présent je perçois sans elle, une réalité contrastée, toute différente de celle que déjà je comprenais peu.

Je n'ai rien fait d'autre que de défaire, sans bien m'en rendre compte. Elle s'est estompée, puis a disparu.

Je la connais par différence, dans le creux de son absence.

J'ai changé d'état, peut-être de peau.

Je n'entendais pas que je l'entendais.

C'est son silence que j'entends.

Le vide d'elle me connecte à des parfums inconnus, de nouvelles saveurs.

Je t'entends. Tu demeures.

Or, cela ne frotte plus, ne m'irrite plus.

Je peux pleinement être là avec toi, dans cette présence légère et détachée qui n'est plus l'anesthésie imposée me dissociant de ces moments suggérés de ne pas être supportés.

Cela s'est défait.

J'ai grandi de cette défaite.

Elle est ma petite victoire impersonnelle sur l'oubli oublié.

Je n'étais pas complétement moi-même.

Je suis là.

Merci petit tyran.

Tu peux continuer d'être toi.

Nous pouvons nous aimer.

Pardonne-moi, si tu peux.

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Texte déposé ©Renaud Soubise

Musique : ©Schubert - Serenade


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